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GOSSIPIUM 5.0, Ema Eygreteau, Tinbox #5

Du 17 mars 2021 au 11 mai 2021   |   Partager   facebook twitter
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GOSSIPIUM 5.0
Ema Eygreteau
Exposition du 17 mars au 11 mai 2021
Galerie Tinbox #5
Place Saint-Projet à Bordeaux


" Gossipium 5.0 " fait suite aux expositions " Gossipium 3.0 " et " Gossipium 4.0 " qui se sont déroulées en 2019 et en 2020. Elle se déroule à la date anniversaire du confinement #1 de 2020.

Ema Eygreteau
Née en 1972, vit et travaille à Bordeaux
Diplômée en Arts Plastiques de l'Université de Bordeaux


similia similibus curantur*

Ema Eygreteau explore les eco-systèmes à l'échelle microscopique et macroscopique. Son travail relie l'infiniment grand à l'infiniment petit, le visible à l'imperceptible, la surface au souterrain, pour créer des mondes en devenir et en évolution constante qui se jouent des échelles. Microbiote cutané, épiderme, imagerie scientifique de végétaux ou de cellules humaines sont ses sources d'inspiration. Peut-être que ce qui l'intéresse est la souche, ce par quoi tout commence, se développe, grossit et grandit. Elle cultive son œuvre, comme une scientifique cultiverait une cellule en laboratoire avec la même rigueur auxquelles se mêlent l'instinct et l'intelligence de la main. De là adviennent de nouveaux agencements et rapprochements. Elle aime à manipuler une multiplicité de matériaux pour créer des formes agissantes. Ses mains la guident, depuis le fil d'une pelote de laine à la mine d'un crayon, en passant par la photographie, le numérique ou la transformation de collants - cette seconde peau – en créations hybrides, à la jonction de l'archaïsme et de la réalité augmentée. De ces médiums de prédilection naissent des installations colonisatrices qui lui permettent de s'exprimer à travers différents gestes : crocheter, coudre, dessiner, assembler, composer. Le travail d'Ema Eygreteau oscille entre le beau et le monstrueux. Il peut être aussi attirant et coloré, qu'inquiétant et repoussant en rendant perceptibles nos réalités organiques, de chairs, d'humeurs et de fluides. Les sculptures textiles " Crosnes " et " Gossipium ", sont les pièces centrales de sa recherche à la fois tumorales, bénignes et malignes, curatrices et destructrices. Oeuvres pansantes, elles relatent les maux du corps et sont également propices à l'écriture de nouveaux récits plus salvateurs, entre réalité et fiction. La plongée dans le moléculaire charnel ou végétal, nous invite également à prendre conscience de notre condition primaire et de la fragilité de l'équilibre psychosomatique du sujet. Nous sommes des terrestres en interconnexion avec notre terrain d'existence et de survivance. Devenir-corps, c'est devenir-monde, c'est devenir-imperceptible. " Chaque multiplicité est symbiotique, et réunit dans son devenir des animaux, des végétaux, des micro-organismes, des particules folles, toute une galaxie. "**
NRK

*" Les semblables se guérissent par les semblables "
** Gilles Deleuze et Felix Guattari, " Capitalisme et schizophrénie 2, Mille plateaux ", ch. " Devenir-intense, devenir-animal, devenir-imperceptible ", p. 312, Les éditions de minuit, 1980



Où atterrir ?*

L'exposition ou l'œuvre " Gossipium " d'Ema Eygreteau se construit comme une série qui revient chaque année avec une nouvelle saison. Ainsi débute la saison 5.0, le 17 mars 2021. Le début n'est d'ailleurs pas le commencement, un peu comme cette saga intergalactique sans fin. Point d'étoile noire, symbole d'une Gaïa obscure, mais une galerie-œuvre Tinbox Mobile rouge propice à la production d'une œuvre évolutive qui a débuté avec la saison 3.0. " Gossipium " est une œuvre expansive qui se déploie selon un procédé imitant la mise en culture cellulaire. La saison 10.0 existe sans doute déjà dans l'esprit créatif et les mains de l'artiste. Elle est apparue en mars 2019 lors de la Biennale d'art contemporain " Organo #6 - carnation végétale " sous le commissariat de Nathalie Canals.

" Gossipium " forme un ensemble de sculptures textiles qu'Ema Eygreteau présente comme " une cellule mi-homme, mi-végétale " qui colonise Tinbox à la manière d'un virus hors de contrôle. L'imaginaire exubérant de l'artiste puise ses sources dans des références médicales et botaniques, telles que des coupes ou des vues au microscope qui révèlent en macro des mondes invisibles à l'œil nu. À un stade déjà bien avancé, elles se déploient dans Tinbox comme des cellules ayant trouvé le bon substrat pour croître. Nous aurions pu imaginer, lorsque " Gossipium 4.0 " est réapparue en 2020, qu'elle n'avait jamais quitté la boîte, son espace de mise en culture. C'est le 18 février 2020 exactement qu'elle fait à nouveau acte de monstration, plus forte, plus rouge, plus en corolle et en couronne. La saison 2 se transforme alors en une réalité-fiction ou en une série d'anticipation. Lors des essais de montages, mi-décembre 2019, nous entendions déjà parler d'un virus lointain qui paralysait la Chine et faisait des milliers de morts, nous étions cependant loin d'imaginer qu'il se propageait déjà de corps en corps, de pays en pays au dessus des mers et allait également nous atteindre et nous infecter. Lorsque les premières images de la Covid 19 ont commencé à être diffusées, la ressemblance avec la pièce centrale de " Gossipium 4.0 " était frappante. Personne ne préméditait alors que le Coronavirus allait aussi paralyser la France, l'Europe, le monde et figer " Gossipium 4.0 " sur la Place Camille Jullian à Bordeaux du 17 mars au 11 mai 2020.

Notre actualité est toujours celle de cette pandémie de la Covid 19 avec de nouveaux variants. Mais des préoccupations plus alarmantes la dépassent, éclipsées par l'urgence de lutter contre ce virus, sans frontières, sans territoires ou terrains de vie, si ce n'est nos corps. Nous éradiquerons ce dernier mais en ce qui concerne la catastrophe écologique qui gangrène la terre, c'est moins certain. Je crois, oui, que tout est interconnecté et interdépendant. Exploitation et destruction des écosystèmes, extinction massive des espèces, dérèglement climatique, déplacement des populations, surpopulation, virus, megafeux, fonte des glaces... voilà ce qui attend les terrestres, actants humains et non-humains*, si nous ne cultivons pas collectivement notre jardin planétaire.

" Gossipium 5.0 " revient, du 17 mars au 11 mai 2021, aux dates exactes du premier confinement et nous rappelle cet enfermement forcé et inédit. Exposition anniversaire exutoire, elle témoigne de cet événement à travers une installation réunissant sculptures textiles, objets du quotidien, photomontage et dessins. Symboliquement, tandis que les lieux d'art sont sous cloche et restent fermés, Tinbox s'ancrera place Saint-Projet sur la rue Sainte-Catherine, artère commerciale principale de Bordeaux, dont le flux ne s'arrête qu'à la fermeture des magasins. Et en prévision d'une troisième vague et d'un hypothétique re-confinement nous avons choisi d'installer " Gossipium 5.0 " à proximité d'un commerce "essentiel".

Nadia Russell Kissoon
Commissaire de l'exposition
Dans le cadre du programme curotorial "Il faut cultiver notre jardin"

*  "Où atterri? - Comment s'orienter en politique", Bruno Latour, Ed. La Découverte, 2017
** Vocabulaire emprunté à Bruno Latour
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GOSSIPIUM par Ema Eygreteau
"Gossipium 3.0, 4.0 et 5.0, est une installation qui propose l'observation à l'échelle macroscopique d'une mise en culture d'une cellule mi-végétale mi-humaine. Cette œuvre polymorphique filée s'appuie sur la forme structurelle des pollens observés au microscope électronique.
Dans un premier temps, le propos est de rendre visible à l'œil nu un processus de mise en culture d'un greffon de cellules végétales et humaines par le format XXL.  Dans un second temps, l'œuvre vise à questionner les manipulations génétiques et propose un regard critique sur l'Anthropocène.

Tinbox, milieu stérile, espace d'expérimentation sans régulateur de croissance devient le lieu de la mise en culture de cette étrange cellule fabriquée par l'homme.

Mythologie personnelle, elle propose une histologie imaginaire d'un Gossipium*. Sur les parois blanches immaculées rappelant l'espace aseptisé du laboratoire, des cellules polylobées cultivent l'ambiguïté des sens. Les protubérances anthropomorphiques forcent le passage de la membrane cellulaire. L'œuvre prolifère, se multiplie, se dissémine, échappant ainsi à tout contrôle. 

Dans un même temps cette installation questionne le processus de création aussi bien dans la cellule hybridée en devenir que dans le choix des matériaux utilisés : le naturel et l'industriel. La main de l'homme n'est jamais très loin tant au niveau du processus de création de la forme que des matériaux. 
Fleur de coton, pollen de coton, le coton brut a été manipulé, transformé. Certaines teintes sont la résultante de l extraction des carnations de plantes : des teintures naturelles. En étant crochetées, elles viennent dialoguer, s'entretisser avec des teintes industrielles.  J'extrais non pas l'odeur  de mes collectes végétales mais leur carnation. Le choix du coton renforce la symbolique de l'œuvre. 

Gossipium 3.0, 4.0 et 5.0, greffon intrigant par ses nodules polylobés qui s'agglomèrent, s'agglutinent, se greffent, se combinent pour proliférer, pointe un futur en devenir plus ou moins inquiétant."

* Gossipium : plante qui produit le coton.


GOSSIPIUM 4.0, EMA EYGRETEAU, GALERIE TINBOX MOBILE from L'Agence Créative on Vimeo.




Gossipium 3.0 - Ema Eygreteau - Tinbox #5 - Biennale Organo from L'Agence Créative on Vimeo.



L'exposition GOSSIPIUM de Ema Eygreteau s'inscrit dans le programme " Il faut cultiver notre jardin " de l'Agence Créative sous le commissariat de Nadia Russell Kissoon :

" Il faut cultiver notre jardin "1 est une sculpture sociale2 qui explore des modes d'expressions transdisciplinaires pour une conscientisation environnementale. Ce projet met en relation des artistes, des scientifiques, des jardiniers, des chercheurs, des philosophes, des hackers, des activistes et des personnes aux cultures et parcours diverses. Ces modes de pensées pluriels en présence accordent une place prédominante à l'imaginaire, aux récits et aux utopies-pirates3. Ce projet permaculturel s'agence sous des formes sensibles - matérielles ou immatérielles - à travers des dialogues, des rencontres, des résidences d'artistes, des expositions, des jardins, des ateliers... " Il faut cultiver notre jardin " propose un rapport élargit à l'art afin qu'il propage une pensée écologiste dans différentes strates du quotidien et de la société dans l'optique d'envisager de nouvelles économies de vies " qui consistent à faire le plus possible avec et le moins possible contre les énergies en place " et de nouvelles manières d'être au monde. Il tente d'impulser dans les consciences un rapprochement symbiotique entre l'Homme et son environnement. Il se veut social, éthique, poétique et politique ; une écosophie qui invite chacun à une résistance douce et créative : jardiner.

1 Voltaire, Candide, "Il faut cultiver notre jardin", Chapitre 30
2 Sculpture Sociale, concept de Joseph Beuys élaboré dans les années 1970
3 TAZ, Zone autonome temporaire, Hakim Bey, 1997, Ed. L'Éclat

Avec le soutien de la ville de Bordeaux, de la Région Nouvelle-Aquitaine et du départent de la Gironde.